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La fin du monde tel que nous le connaissons.

Publie le lundi 7 juillet 2008 par Open-Publishing
10 commentaires

La fin du monde tel que nous le connaissons.

Chronique de l’ancien ministre de l’Environnement Yves Cochet, parue sur le site Actu-Environnement (29 mai 2008).

Nous sommes drogués au pétrole, nous ne pouvons pas nous en passer, nous sommes prêts à tout pour continuer notre addiction. Nous, c’est-à-dire le tiers le plus riche des habitants de la planète. Cette situation, à elle seule, aura bientôt des conséquences dévastatrices dans tous les domaines, sur tous les continents. La hausse actuelle du cours des hydrocarbures n’est pas un simple choc pétrolier - comme ceux que nous avons affrontés en 1973 et 1979 - c’est la fin du monde tel que nous le connaissons.

Cet événement, dont nous apercevons les prémisses, provient de la coïncidence, sur quelques années, de trois facteurs inédits :

1) le déclin définitif de la production de pétrole (géologie) ;

2) l’excès structurel de la demande mondiale sur l’offre de pétrole (économie) ;

3) l’intensification des guerres et du terrorisme pour l’accès aux ressources non renouvelables (géopolitique).

Ces trois facteurs, se renforçant mutuellement, provoquent d’abord une hausse des prix des produits pétroliers, puis du gaz et de l’énergie, enfin de toutes les denrées et services qui en dépendent. Bref, nous entrons dans une période d’inflation, de récession, de tensions internationales, de guerres.

1) En 1956, King Hubbert était géologue à la société Shell. Il publia un article peu remarqué affirmant que la production pétrolière des 48 premiers états américains - la plus importante du monde à cette époque - allait croître jusqu’en 1970, puis décliner inexorablement ensuite. Il fallut attendre un peu plus de quatorze années pour lui donner raison : la production américaine ne cesse de décroître depuis 1970. En extrapolant les méthodes de Hubbert à l’ensemble de la planète, on peut estimer que nous avons atteint aujourd’hui - en 2008 - le maximum de la production mondiale de pétrole.

Ceci est un évènement exceptionnel dans l’histoire humaine. Pour la première fois, les volumes de la matière première la plus indispensable à l’ensemble de l’économie mondiale auront cru pendant cent cinquante ans pour diminuer ensuite, sans coup férir, année après année. L’image mentale de la « croissance » - du PIB, de la population, du nombre d’automobiles… - se heurte à la décroissance géologique, inéluctable, irréversible de son plus précieux fluide. La singularité de cet évènement est telle qu’aucun modèle du monde économique, aucune information massive de sensibilisation, aucune politique d’évitement ou d’adaptation n’auront précédé son advenue. Cette ignorance est catastrophique.

2) Le second facteur créateur du choc est le croisement actuel de deux courbes. La courbe de la demande mondiale de pétrole et celle de l’offre mondiale, qui a toujours été supérieure à la première, jusqu’à présent. Aujourd’hui, la demande dépasse l’offre. Cette nouvelle situation d’excès structurel de la demande mondiale sur l’offre provoque une tension sur les marchés des cours du pétrole et, finalement, une hausse forte et définitive de ces cours. L’inflation des prix des produits pétroliers se propage aux autres domaines, notamment l’agriculture et la pêche, les transports et le tourisme.

Les esprits cornucopiens - croyants en une corne d’abondance éternelle - estiment tranquillement que le croisement des courbes de l’offre et de la demande ne durera pas, la technologie, le marché et l’ingéniosité humaine parvenant à prolonger les modes de production et de consommation industriels, et même à les étendre au monde entier.

La consommation d’énergie ne peut que croître. L’avenir est radieux, la mondialisation heureuse. Les économistes prétendent que le prix de l’énergie doit tendre vers le coût marginal. J’estime, au contraire, que le prix d’une énergie doit tendre vers le coût de sa substitution éventuelle, qui est bien plus élevé que le prix actuel. Autrement dit, à 130 dollars le baril et à 1,50 euros le litre à la pompe, le pétrole n’est pas cher. Nous nous en apercevrons bientôt lorsque le baril sera à 300 dollars et le litre à 3 euros.

3) Hausse des cours du pétrole. Inflation. Augmentation des taux d’intérêt. Dette. Création de monnaie. Dévaluation. Baisse du pouvoir d’achat, baisse des achats. Récession. Tensions internationales… Le pétrole en hausse, c’est la guerre.

Les pays gros consommateurs de pétrole n’en possèdent pas, ou n’en possèdent plus, ou moins que jadis. La France et l’Allemagne n’en ont pas. Les Etats-Unis importent aujourd’hui plus de la moitié de leur consommation. La Grande-Bretagne est devenue importatrice en 2004, du fait de la déplétion des champs de la mer du Nord. Favorisées par la nature (?), les grandes régions exportatrices sont le Moyen-Orient, l’Oural-Volga et la Sibérie occidentale en Russie, le golfe de Guinée, le Venezuela et le Mexique.

Les pays du Moyen-Orient, qui détiennent les deux tiers des réserves de pétrole et assurent 31 % de la production, ne contribuent qu’à 6 % de la consommation mondiale. Une situation semblable, bien que moins contrastée, prévaut en Afrique (production : 11 % ; consommation : 3 %) et en Amérique latine (production : 10 % ; consommation : 6 %). À l’opposé, les régions grandes consommatrices sont importatrices : l’Amérique du Nord (production : 18 % ; consommation : 30 %), l’Europe (production : 9 % ; consommation : 22 %) et l’Asie-Océanie (production : 10 % ; consommation : 28 %).

Ce qui fut appelé « développement » au cours de la seconde moitié du vingtième siècle se résume à une qualité : l’accès à l’abondance pétrolière bon marché pour produire du travail mécanique. C’est pourquoi les Etats-Unis furent et demeurent le premier des « pays développés ». Pendant la majeure partie de ce dernier siècle, ils possédèrent, avant et plus que tout autre, cet accès au pétrole sur leur territoire et par l’intermédiaire de leurs compagnies transnationales.

Mais les temps changent. Découvertes en chute, offre stagnante, demande croissante, guerres pour l’accès. Telle est la formule de la déplétion pétrolière qui s’annonce. Le choix des pays industrialisés est binaire : ou bien ils décident leur sevrage immédiat et rigoureux, ou bien ils continuent leur addiction par la force. La première alternative est la seule manière de sauvegarder la solidarité, la démocratie et la paix, mais nous avons choisi la seconde : la guerre (Irak, Afghanistan, Darfour…).

Cette situation n’est pas « la fin du pétrole » ou « la fin des énergies fossiles », c’est la fin de l’énergie bon marché et, conséquemment, la fin du monde tel que nous le connaissons, c’est-à-dire, avant quinze ans, la fin de la croissance économique, la fin du capitalisme, la fin de l’Union européenne, la fin de l’aviation commerciale de masse, la fin de la grande distribution…

Les transitions énergétiques des siècles passés - du bois au charbon, du charbon au pétrole - étaient graduelles et adaptatives, le pic de Hubbert sera brusque et révolutionnaire. La fin du pétrole bon marché est la plus grande épreuve qu’ait jamais affrontée l’humanité (c’est LE problème). Afin d’en repousser un peu la date et d’en réduire un peu les effets désastreux, la seule conduite possible est l’apprentissage de la sobriété (c’est LA solution). C’est-à-dire, politiquement, une perspective d’autosuffisance décentralisée, par la décroissance de la consommation, par la décroissance des échanges de matières et d’énergie, par une mobilisation générale de la société autour d’une sorte d’économie de rationnement solidaire et démocratique.

Dans l’immensément complexe cycle du carbone, l’aval du cycle, désormais connu sous l’appellation de « changement climatique », est aujourd’hui l’objet d’une certaine attention, voire de quelques faibles décisions (Protocole de Kyoto, Grenelle de l’environnement) destinées à réduire ou à s’adapter aux épisodes climatiques extrêmes qui se profilent. Mais le changement climatique, bien que rapide au regard des temps géologiques, est dix fois plus lent que l’amont du cycle du carbone, c’est-à-dire le pic de Hubbert, le « Peak Oil ». Si celui-là se mesure en décennies, celui-ci se mesure en années. Nous ne sommes plus dans la prévision, nous sommes dans le compte à rebours.

http://www.yvescochet.net/wordpress/?cat=7

Messages

  • Bref, nous entrons dans une période d’inflation, de récession, de tensions internationales, de guerres.

    de guerres, je veux bien, mais les tanks, les avions ils avanceront comment sans le pétrole ? Ces gros buveurs sont déjà périmés, et c’est tant mieux pour l’humanité !

    Maintenant, messieurs les tricheurs et les camoufleurs, veuillez sortir tous les brevets planqués dans les fonds de tiroir depuis des années, qui auraient dû nous assurer l’indépendance énergétique, la possibilité de faire tourner nos véhicules autrement qu’avec de l’essence puante et polluante. Idem pour soigner les maladies.

    Après tout, ces bureaux d’études et de recherches ont bénéficié de subventions de l’Etat donc de nous, exigeons aussi un juste retour sur "investissements" de nos efforts financiers.

    • C’est un espoir pour les gogo’s
      NE REVEZ PAS !! IL N’Y A PAS DE SOLUTION MIRACLE !!
      Prenons l’electricite , c’est moins de 20% de la consommation d’énergie de notre pays c’est a dire qu’il faudrait en gros pour que tout le monde roule a l’electricite ou a l’air comprimé multiplier la production par cinq et les reseaux electriques dans le meme ordre de grandeur soit plus de 300 réacteurs nucléaires !!!!
      ou de centrales au charbon encore plus polluantes en co2 que les centrales au fuel, quand a l’eolien, je vous laisse vous meme calculer la quantité phénoménale a produire en quelques années.
      Pour l’hydrogène , c’est pareil car ce n’est pas une source d’énergie mais un vecteur d’énergie ce qui veut dire qu’il faut le produire et actuellement les rendements possible pour un pays dépourvu d’énergie primaire ne sont pas encore interessant.
      Il va falloir repenser notre économie , notre mode de vie et nous battre contre les multinationales qui se préparent à nous transformer en esclaves pour conserver leur taux de profit mais surtout ne pas croire aux miracles , il faudra toujours 4.18 joules pour élever la temperature d’1 g d’eau de 1 degre en 1 seconde.

    • Voyons, les militaires et les riches en auront tj un peu alors que le petit peuple ne pourra plus s’en payer du pétrole...

      Malheureusement, cette crise qui personnellement m’effraie car il n’y A PAS DE SOLUTION MIRACLE , le peuple en paira le prix fort, c’est évident...

      Le terreau politique sera fertile à tout type de changement, y compris fascisant, à mon avis....

      Nous allons vivre, en tout cas c’est certain, et Yves COchet a raison je crois des changements d’une ampleur atomique pour l’humanité....

      D’ici quelques mois à tout casser le litre de super sera à 3 Euros, puis dans moins de 10 ans à 10 euros et petit à petit cela sera plus cher que très très cher....

      C’est à dire qu’on ne pourra tout simplement plus mettre d’essence dans le réservoir faute d’argent .....Bc de gens ne pourront meme plus aller bosser car cela deviendra plus cher que les salaires perçus....

      IlROsso....

    • tu rèves mon cher, en tout cas si les maitres du monde avait des solutions alternatives ils ne seraient pas en train de s’implanter militairement sur les zones pétroliferes
      analyse la carte de présence militaire à travers le monde tu comprendras que l’après pétrole a déjà commencé : nous sommes entrés dans une période charniere
      une période que beaucoup nomme la "transition"

      tu n’as pas longtemps à attendre (sans rien faire à ton niveau) : 5ans tout au plus, ensuite tu n’auras aucun autre choix que de faire la queu pour percevoir ta pitance et on te martellera que tu as de la chance...

      des brevets dans des placards lol le moteur perpétuel ? l’essence infuse ?
      le moteur à implosion ?

  • Il est possible de vivre sans voiture en ville. On peut louer des voitures électriques légères pour se promener à la campagne. On put se passer de véhicules lourds pour les déplacements lorsqu’on n’a pas besoin de transporter de gros objets. Si on ne doit pas transporter d’objets encombrants ou lourds, à la campagne ou à la ville, on peut aller au travail avec un véhicule électrique motorisé léger. On peut utiliser un vélo électrique ou non.

    C’est un minimum. On peut peut-être faire mieux : relocalisation de l’économie.
    Mais bon. Après, il faut s’organiser.
    Pour ceux qui habitent loin de leur travail, il faut prévoir soit des véhicules électriques soit des transports collectifs.

    Il est possible d’augmenter la part des énergies renouvelables et du nucléaire s’il le faut.

    Il n’y a que les défaitistes qui baissent les bras.

    DD.

  • Selon des experts et observateurs, l’offe est actuellement supérieure à la demande et la spéculation est la cause première de la hausse du pétrole. Le dollar a baissé par rapport à l’euro et la répercussion ne se voit pas non plus dans le prix du pétrole.

    http://www.alterinfo.net/Le-prix-de-l-essence-pourrait-baisser-de-moitie-si-le-Congres-agissait_a21398.html?PHPSESSID=0ac8598c70f57c3a1f1045879c501eef

    http://lesogres.org/article.php3?id_article=3535

  • L’armée US consomme CHAQUE JOUR 700 000 barrils de pétrole

    http://bellaciao.org/fr/spip.php?ar...

    Le prix du barril à 200 dollars aurait été prescrit par le groupe Bilderberg (Banquiers et ex-nazis), qui se réunit avant le G8, puis donne ses directives aux riches qui sont rassemblés là.

    http://bellaciao.org/fr/spip.php?ar...