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Réaction de Me Henri Leclerc à la proposition de loi demandant le rétablissement de la peine de mort

Publie le samedi 1er mai 2004 par Open-Publishing

Question : cette proposition de loi est-elle une gesticulation ou bien est-il possible aujourd’hui - constitutionnellement parlant - de rétablir la peine de mort en France ?

Réponse de Henri Leclerc :

Il s’agit évidemment d’une manoeuvre politicienne dont les auteurs savent parfaitement qu’elle n’a aucune chance d’aboutir.

Ce n’est pas seulement des raisons juridiques qui empêchent de rétablir la peine de mort, c’est aussi, me semble-t-il - et c’est pour les abolitionnistes de toujours une heureuse surprise - l’état actuel de l’opinion sur ce sujet. Mais il est vrai que chaque crime odieux provoque une flambée de colère débouchant inéluctablement sur une revendication de retour en arrière. Il faut donc combattre de telles propositions politiquement et montrer que le retour à la barbarie n’est pas une arme que les démocraties peuvent utiliser, même contre la barbarie elle-même et que le combat qu’il convient de mener est celui de l’abolition universelle, en particulier, bien sûr, aux Etats-Unis. On peut toujours rappeler à ce sujet d’ailleurs que les 3500 occupants des couloirs de la mort et la centaine d’exécutions annuelle n’ont pas fait reculer les crimes de sang ni empêché le 11 septembre. Puisque cette proposition est une gesticulation politique ne feignons pas de l’ignorer et n’hésitons pas à engager le débat qui provoque inéluctablement une réflexion sur le sens de la peine, sur la prison et plus généralement sur le problème de la confrontation en démocratie entre la répression du crime et le respect des droits de l’homme.

Juridiquement, c’est en effet le protocole n° 6 annexé à la Convention européenne des droits de l’homme qui prévoit l’abolition de la peine de mort. La France l’a ratifié comme les 45 pays du Conseil de l’Europe ( y compris la Turquie, mais à l’exception notable de la Russie qui dit ne plus l’appliquer mais la conserve dans son arsenal).

Pour les Etats qui l’ont ratifié le protocole n° 6 est indissociable de la Convention. Certes il est possible de se retirer de la Convention. Mais c’est politiquement inconcevable

Rappelons aussi que l’article 2 de la Charte de l’Union européenne impose, sans restrictions aucunes, l’abolition.

Ne baissons pas la garde !

Henri Leclerc

Pour en savoir plus :
http://perso.wanadoo.fr/felina/doc/pdm/gesticulation.htm