Accueil > Retraites : la mobilisation ne faiblit pas
Trois millions de manifestants selon les syndicats, 899 000 selon le ministère de l’intérieur : comme lors des précédentes journées de mobilisations contre la réforme des retraites, syndicats et gouvernement jouent à la bataille des chiffres.
Un bilan de la journée très différent. Pour les syndicats, "le pari est tenu". Les dirigeants syndicaux insistaient sur la venue en nombre d’"un public de nouveaux participants", tandis que d’autres avaient passé leur tour. "C’est la preuve que la zone de mécontentement populaire s’amplifie parmi les salariés", a insisté M. Thibault.
Son homologue de la CFDT, François Chérèque, y voit une validation de l’idée d’une manifestation un samedi, toutes les journées précédentes ayant eu lieu en semaine. "C’est un bon choix parce que ça permet aux personnes qui ne viennent pas d’habitude de venir", a-t-il dit. Beaucoup étaient cette fois venus en famille, et l’on n’avait jamais vu autant de poussettes que samedi dans les cortèges.
"Chacun reconnaît ce soir qu’il n’y a pas d’amplification du mouvement alors qu’on pouvait penser que l’organisation d’une manifestation le samedi drainerait de nouveaux publics", a pour sa part estimé Luc Chatel, le porte-parole du gouvernement. Il n’a pas exclu quelques aménagements de la réforme au Sénat. "Il y avait encore des manifestants aujourd’hui et cela appelle des éclaircissements. Le débat au Sénat en séance publique va permettre de faire évoluer le texte par amendements, sur un certain nombre de sujets, les travailleurs handicapés, les chômeurs âgés, les victimes de l’amiante".
Des écarts de chiffres caricaturaux. Les chiffres annoncés de part et d’autre répondaient au même objectif : permettre une comparaison avec la dernière manifestation du 23 septembre. Dans de nombreuses villes, les chiffres sont d’ailleurs comparables avec les estimations que les syndicats et la police donnaient fin septembre. A Paris, la préfecture de police a annoncé 50 000 manifestants, peu après le départ de la manifestation, avant de corriger son estimation et d’annoncer 63 000 personnes. 2 000 de moins que le 23 septembre. Les syndicats ont compté 310 000 manifestants, contre 300 000 le 23 septembre. Dans plusieurs grandes villes, comme Marseille, Bordeaux, Toulouse ou Nantes, les écarts entre chiffres syndicaux et policiers sont toujours aussi caricaturaux. (Voir notre carte comparative).
Dans certaines villes la mobilisation a probablement été amputée pour cause de mauvais temps. A Rennes, 20 000 manifestants ont défilé sous une pluie battante, les opposants à la réforme étaient clairement moins nombreux que le 23 septembre. Marcel Grignard, secrétaire général adjoint de la CFDT a relevé "des variations importantes selon les villes, notamment en raison des conditions météo" avec, par exemple, "un temps épouvantable" à Rennes.
Comment gérer la suite ? Les dirigeants syndicaux, qui se réuniront lundi pour affiner leur stratégie, ont exhorté le gouvernement à sortir de son "blocage". Ils préviennent qu’ils ne reculeront pas. Si les grandes centrales divergent sur le bien-fondé de lancer une grève reconductible, elles ont d’ores et déjà programmé une nouvelle journée d’action, avec grèves à la clé cette fois, le mardi 12 octobre.
"On ne reculera pas", a prévenu Bernard Thibault. "On gardera cette fermeté et ce soutien populaire nous engage à continuer", a déclaré en écho François Chérèque, qui réclame "des gestes apaisants du gouvernement pour enfin ouvrir le dialogue et construire une vraie réforme". Si Bernard Thibault ne s’est pas prononcé pour des grèves reconductibles, il a répété dans la manifestation que "si le gouvernement confirme son intransigeance, il ne faudra pas s’étonner si la mobilisation prend d’autres formes".
La dirigeante du Parti socialiste, Martine Aubry, a, elle, demandé à François Fillon de reprendre la réforme à zéro. "Puisqu’il dit qu’il pense différemment, le premier ministre devrait dire : ’on arrête tout, on recommence, on met tout sur la table et on fait une nouvelle réforme juste et efficace’"," a-t-elle déclaré à Paris, où elle a manifesté à l’instar d’autres dirigeants de gauche, de Cécile Duflot (Verts) à Jean-Luc Mélenchon (Parti de gauche).