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SNCM : la porte claquée

Publie le jeudi 13 octobre 2005 par Open-Publishing
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Le jusqu’au-boutisme n’est pas du côté des marins et des syndicalistes de la SNCM, mais bien du côté des ayatollahs de la privatisation.

de Jean-Paul Piérot

Quelle est la part de provocation sciemment préméditée ? Quelle est la part d’irresponsabilité d’un gouvernement cultivant au plus haut point le mépris des salariés ? L’attitude des deux ministres, Thierry Breton et Dominique Perben, qui ont refusé le moindre débat avec les représentants des syndicats de la SNCM et ont quitté précipitamment - comme des voleurs, oserait-on dire - la réunion, hier, à la préfecture des Bouches-du-Rhône, a achevé de les discréditer aux yeux du personnel de la compagnie nationale.

Mais au-delà de leurs personns, puisqu’ils n’étaient que des missi dominici de l’Hôtel Matignon, c’est Dominique de Villepin qui vient de montrer les limites de son sens du dialogue, dès que l’on parle de choses sérieuses. Et pour un libéral, les privatisations sont un domaine qu’il n’entend pas soumettre ni au débat ni à l’expertise.

En claquant la porte aux salariés, les ministres TGV, qui en étaient à leur troisième voyage express en trois semaines dans la cité phocéenne, ont signé la tentation du coup de force. Avec pour but de tenter d’imposer le désengagement de l’État au sein d’une société publique chargée d’assurer aux citoyens le droit à la continuité territoriale entre la Corse et le reste de la France. Qui donc prolonge et durcit un conflit dont le bon sens commande de rechercher une issue par le haut ? Certainement pas les salariés, qui se battent pour leurs emplois et la pérennité de l’entreprise, ni singulièrement la CGT qui voulait soumettre à la discussion avec les pouvoirs publics des propositions alternatives à la privatisation, que l’Humanité publie aujourd’hui.

Le jusqu’au-boutisme n’est pas du côté des marins, mais bien du côté des ayatollahs de la privatisation. Qu’on en juge. Alors que la SNCM est actuellement publique à 100 % (93 % État, et 7 % SNCF), les syndicalistes de la CGT sont disposés à discuter d’une ouverture du capital, dès lors que la majorité reste, comme le précise Jean-Paul Israël, « dans le giron public », ce qui permet d’étudier diverses variantes, et que les intervenants privés soient des industriels et non des spéculateurs. Quoi de plus raisonnable pour quiconque veut garantir, pour l’avenir, la mission publique de la compagnie ? Faut-il rappeler que la SNCM est née en 1976 de la faillite du privé dont dépendaient jusqu’alors les liaisons entre l’île et le continent ? Quant aux autres compagnies, et particulièrement Corsica Ferries, elles ont pu se développer et profiter de la concurrence parce qu’elles étaient adossées à la SNCM qui répond aux exigences du service public de la continuité territoriale.

Face à eux, les 2 400 salariés de la SNCM ont un gouvernement qui a d’abord essayé de vendre, sans la moindre concertation, par la simple annonce d’un préfet, 100 % de la société à un fonds d’investissement. Seule la pression syndicale a contraint Matignon à envisager une participation étatique de 25 %. Et, aujourd’hui, il ferme la porte à toute autre négociation, prend la responsabilité d’envenimer le climat. Il menace les salariés : la privatisation ou le dépôt de bilan.

Au-delà du chantage et des difficultés juridiques d’une telle opération (l’État unique actionnaire ne pouvant pas se déclarer en cessation de paiement), Dominique de Villepin prend le risque politique d’entrer dans l’histoire comme le premier chef de gouvernement qui provoquerait la liquidation une grande entreprise publique. Il y a mieux en matière de « patriotisme économique » ! Pourquoi donc un tel acharnement à ne pas vouloir explorer d’autres solutions que la primauté au privé, pour sortir la SNCM de ses difficultés financières ? Parce que le gouvernement veut sceller le sort de la SNCM dans la même logique que pour EDF, qu’il se prépare à ouvrir au capital financier, aux sociétés d’autoroutes qu’il veut livrer à la Bourse. C’est dire combien le combat des salariés de la SNCM rejoint celui de tous les défenseurs des services publics.

http://www.humanite.presse.fr/journal/2005-10-11/2005-10-11-815771

Messages

  • Plus personne ne peut nier :

      l’orientation ultra-libérale de Bruxelles
      la guerre économique livrée par les USA et ses taupes en Europe
      les mensonges du PS, aligné avec la droite sur le TCE et les services publics
      la désinformation des médias
      la trahison de la gôche bobo (http://www.nouvelobs.com/articles/p2136/a280099.html)
      l’impuissance des ministres (pourquoi payer grassement ces cloportes ?)
      le copinage et les renvois d’ascenseurs entre politiques et affairistes
      le travail de sape des syndicats jaunes
      la volonté de détruire les derniers bastions du syndicalisme digne de ce nom
      l’apathie de la population au sujet de questions qui la concernent au premier chef
      l’enterrement des services publics, qui annonce celui du SMIC et de tous les acquis

    Tout cela n’incite guère à l’optimisme : si on ne se bouge pas et au niveau européen, on va tous se faire bouffer tout cru.

  • extrait d’une dépêche AP du 13/10 à 13h12


    SNCM : le personnel vote la fin de la grève

    MARSEILLE (AP) - L’assemblée générale des salariés de la SNCM s’est largement prononcée jeudi à Marseille pour l’arrêt d’une grève durant depuis plus de trois semaines. Sur 592 votants, 519 ont voté "oui" et 73 "non".

    Des représentants syndicaux sont attendus à 15h30 en préfecture pour négocier un protocole de sortie de grève averc le préfet de région Christian Frémont. A 18h, une nouvelle AG se déroulera dans le car-ferry "Méditerranée".

    Bernard Marty, secrétaire CGT du comité d’entreprise de la SNCM, a fait valoir le souci de réalisme. "Je ne mets pas un genou à terre, mais je fais un pas en arrière. Les marins sont des gens responsables et, qu’on se le dise, le combat n’est pas terminé, il va désormais prendre d’autres formes".

    Même écho du côté des salariés. Selim, qui n’a donné que son prénom, dit avoir eu "le choix entre la peste et la gale et on s’est nous-mêmes inoculés le vaccin". "Ce que vous voyez, c’est la défaite d’un syndicaliste et j’espère qu’après le pas en arrière qu’on est obligé de faire, il y aura plein d’autres pas en avant. On n’est pas là, on n’a jamais été là pour détruire la SNCM, il faut qu’elle vive. On va se battre et défendre les intérêts du service public".


    Rappel : L’Union départementale CGT organise une manifestation unitaire CGT , CFDT, CFTC, FSU, Solidaires) le samedi 15 octobre, 15 h au Vieux Port

    Lire aussi (entre autres appels) Ne laissons pas la SNCM au mains des voyous !

    Continuons à manifester notre solidarité ( écrite, mais aussi financière) avec les camarades en lutte !

    N’oublions pas aussi le conflit de la RTM : les camarades luttent aussi contre la privatisation des transports marseillers ; comme par hasard, on retrouve le même opérateur Connex, à qui la ville veut confier le tramway marseiller

    SOLIDARITE !

    Patrice Bardet