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Scandale et viols chez les anti-IVG

Publie le dimanche 6 février 2005 par Open-Publishing

Le directeur d’un foyer anti-IVG accusé de viols aggravés

"Le directeur du foyer Ariane de La Roche-sur-Yon (Vendée) est poursuivi pour harcèlements sexuels et viols aggravés sur le personnel et les pensionnaires. Le centre, fondé en 1996 par Philippe de Villiers, se veut une alternative à l’avortement. La Roche"

de Rodolphe Landais

LONGTEMPS, très longtemps, les employées comme les pensionnaires du foyer Ariane se sont tues. Pensez donc : des affaires de moeurs dans une si respectable institution ? Personne ne le croirait, c’était même le principal argument de leur bourreau quand il devait les convaincre de ne rien dire. Mais le 28 janvier dernier, la vérité a éclaté au grand jour.

Depuis 2002, il y a bien eu des harcèlements sexuels et même des viols dans l’établissement. Pour l’instant, le directeur est poursuivi pour huit victimes déclarées, âgées de 4 ans à 51 ans, et autant de qualifications qui vont du harcèlement sexuel au viol aggravé. Parmi les femmes qui ont subi les agressions du directeur de 61 ans, on compte trois employées, quatre pensionnaires, la fille d’une résidente et le décompte est très provisoire.

Les futures mères culpabilisées et humiliées Curieux endroit que ce foyer créé à La Roche-sur-Yon en 1996 par Philippe de Villiers, le président du conseil général de Vendée. A l’époque, il s’agissait, en vertu de principes purement idéologiques, d’offrir aux jeunes femmes enceintes une alternative à l’IVG. Le nom de la structure
gestionnaire du centre est d’ailleurs sans ambiguïté : « Association pour l’accueil de la vie et la promotion de la famille ». Tout est dit, au moins peut-on le croire. On promet alors aux jeunes femmes en détresse le gîte et le couvert en attendant leur accouchement et une attention bienveillante. Mais la réalité est tout autre : dès 2001, d’anciennes pensionnaires rapportent un quotidien quasi moyenâgeux. « En arrivant au centre, j’étais enceinte de trois mois, se souvient une jeune femme.

Je devais me mettre à genoux pour passer la serpillière plusieurs fois par jour, j’étais épuisée et j’ai accouché à cinq mois et demi de grossesse. Et puis, il y avait cet engagement qu’on devait prendre de suivre des cours de rééducation », témoigne l’une d’elles. Dans le détail, on culpabilise les futures jeunes mères avant de leur inculquer les bonnes pratiques s’agissant des relations avec les hommes. Accessoirement, les vexations pleuvent : « Tenez-vous bien et rappelez-vous que, dehors, personne ne veut de vous. » « Après ce que vous avez fait, jamais on ne vous embauchera dans la région. ».

Reçu par des jeunes femmes fragilisées, ce discours est encore plus violent.
« Ou tu acceptes, ou je te remets dans la rue avec ton gosse » Pourtant, malgré ces témoignages, le conseil général de Vendée ne bronche pas, la DDASS (Direction départementale des affaires sanitaires et sociales) non plus. Bien que le foyer se proclame ouvertement contre l’IVG, la République, bonne fille, finance et jette un voile pudique sur ces récits. En 2002, un nouveau directeur arrive, mais un détail important échappe à ses employeurs. Il s’agit de deux délits à connotation sexuelle qu’il a commis dans le passé. Dès l’été 2003, la « chasse » est ouverte et les premières victimes sont des employées, « recrutées sur un profil bien précis », rapporte un enquêteur. « Des femmes seules qui assument leurs enfants avec un maigre salaire ».

Des proies faciles à qui le directeur commence par expliquer pendant plusieurs jours qu’elles n’ont plus le « profil du poste », avant d’ouvrir une perspective contre des faveurs sexuelles. S’agissant
des jeunes femmes suivies par le foyer, le discours est beaucoup plus direct : « Ou tu acceptes, ou je te remets
dans la rue avec ton gosse », a-t-il dit à l’une de ses victimes. Le sommet de l’ignominie est atteint quand le directeur s’en prend à l’enfant de 4 ans d’une pensionnaire. « Tant que c’était du harcèlement moral ou même sexuel sur nous, on pouvait encore se taire, mais là, c’était devenu impossible », a confié une employée. Le 28 janvier dernier, deux salariées ont tout raconté aux policiers en précisant que « tout le monde savait depuis plus d’un an ».

Placé en garde à vue, le directeur du foyer Ariane a d’abord tout nié avant de minimiser les faits. L’affaire ? « Un complot ! ». Les agressions sexuelles ? « J’avais une attitude don juaniste, mais rien de plus. » Les viols ? « Elles étaient consentantes. » Le reste est à l’avenant. Fait rare dans les pratiques judiciaires, malgré huit chefs de mise en examen dont cinq passibles des assises, le directeur du centre a été remis en liberté sous contrôle judiciaire. Le scandale est remonté jusqu’à la chancellerie via le parquet général de Poitiers. Instruction écrite a été donnée au parquet de La Roche-sur-Yon de faire appel de cette décision et l’audience est prévue le 15 février. « En apprenant que ce type était dehors, on a failli jeter la procédure par la fenêtre », assure un proche du dossier. Manifestement, l’affaire dérange quelques bonnes âmes.

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