Accueil > chroniques citoyennes (10) : poussières
« Nous sommes nés des étoiles, poussières d’étoiles » aime à répéter Hubert Reeves, astrophysicien de son état* et je me plais à le croire quand j’observe l’immensité du ciel un soir de printemps. Dans sa pensée, le philosophe et humaniste n’aborde pas cette réflexion au travers du filtre de la religion et il ne sous entend pas que notre statut est synonyme d’insignifiance, bien au contraire et le concept « tu es né poussière, tu redeviendras poussière » n’a ici pas lieu d’être. Plus prosaïquement, il est question de la place de l’homme dans l’univers et de son originalité qui pousse parfois certains qui se veulent créationnistes, à réinventer l’histoire de l’univers à des fins partisanes.
Oui, nous sommes poussières d’étoiles car nous sommes de la même matière que les étoiles, nos atomes ont les mêmes origines et il n’y a en cela que la formidable mise en œuvre de forces énergétiques d’une puissance incomparable qui façonne encore et toujours notre univers, qui le porte en une expansion sans fin, qui nous éloigne autant du big bang originel qu’un jour il nous en rapprochera (E=MC² disait Albert Einstein). Alors, du haut de notre minuscule planète, fut elle encore bleue vue de l’immensité galactique, n’aurions nous pas besoin de mesurer enfin combien nous sommes riches ? N’aurions nous pas besoin de conserver notre espace vital, La Terre support de notre vie dans les meilleures conditions possibles ?
J’ai toujours pensé qu’il y avait un lien très fort entre l’organisation de l’univers et les sociétés que les hommes se bâtissent : un lien inversement proportionnel à la durée des civilisations puisque ces dernières ne représentent rien à l’échelle du temps universel. Alors, quand j’écoute de doctes personnages gloser sur l’importance de telle ou telle chose de la vie courante, je me prends à relativiser et je vous invite à prendre le recul qui s’impose, à regarder le ciel, à repérer les étoiles qui brillent au firmament de notre pensée et à construire la vie qui vous convient le mieux en se disant que même poussière, nous valons mieux que ceux qui prétendent régir notre vie.
Quand nous agissons pour préserver notre milieu naturel, notre environnement, quand nous choisissons de construire plutôt que de détruire, quand notre intelligence se met au service des êtres vivants, de tous les êtres vivants de notre planète, nous prenons une valeur incommensurable. Quand nous saurons modeler le monde autrement qu’en termes de productions, de profits, de rentabilité, nous serons ces poussières capables un jour d’atteindre les étoiles et de partager un peu de la lumière qui brille en chacun de nous.
Auteur entre autre de « Malicorne » et « Mal de Terre » parmi les derniers ouvrages parus aux éditions Le Seuil