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Réforme de la carte judiciaire : Dati a fini ses visites sur le terrain, la contestation continue
Publie le lundi 19 novembre 2007 par Open-PublishingLes déplacements de la ministre de la Justice, Rachida Dati, se sont clos vendredi à Lyon, puis à Bastia. Le ministère va devoir maintenant passer à la phase concrète de la réforme et entamer avec les professions concernées des négociations sur sa mise en oeuvre.
de VALÉRIE DE SENNEVILLE
Pressée d’en finir, Rachida Dati a achevé vendredi la présentation dans les régions de la réforme de la carte judiciaire. La Corse a été la dernière étape d’une tournée des cours d’appel entamée le 12 octobre à Lille. Mais la ministre de la Justice n’est pas au bout de ses peines. Passé les annonces que certains, à droite comme à gauche, ont jugées « brutales », Rachida Dati va devoir maintenant passer à la phase concrète de la réforme et entamer avec les professions concernées des négociations sur sa mise en oeuvre. La fin de ces déplacements ne met donc pas fin à la contestation : une entente syndicale formée par le Syndicat de la magistrature (SM, gauche) et trois syndicats de fonctionnaires judiciaires (Usaj, CGT, CFDT) a appelé à la grève le 29 novembre. Le Conseil national des barreaux (CNB) a décidé de se joindre au mouvement : « Cette mauvaise méthode aboutit à un gâchis auquel les avocats ne peuvent se résoudre », explique le communiqué de l’institution. L’Union syndicale des magistrats (USM, majoritaire), quant à elle, a simplement souhaité se joindre à la « mobilisation nationale » et aux rassemblements organisés dans les juridictions.
Retour sur le fond et sur la forme de la réforme.
Pourquoi ?
Le but est de réduire les coûts et d’améliorer la qualité de la justice. La carte judiciaire de la France avec ses 1.200 juridictions est, dans ses grandes lignes, inchangée depuis 1958. C’est pourquoi la plupart des plans qui depuis une vingtaine d’années sont élaborés par la chancellerie parlent, dans l’ordre, d’une spécialisation des juridictions entraînant une diminution de leur nombre - c’est notamment l’objectif non avoué de la mise en place des pôles de juridiction qui entreront en vigueur en mars prochain. La suppression des tribunaux d’instance n’a été abordée qu’à la marge. Cependant, si le principe d’une réforme est largement partagé, tous les gardes des Sceaux se sont cassé les dents sur l’ampleur de la tâche et l’opposition des élus et des professions juridiques. Le programme électoral de l’UMP prévoyait de maintenir une seule cour d’appel par région et un seul tribunal de grande instance (TGI) par département.
Combien ?
Ce sont finalement les tribunaux d’instance (TI) qui font majoritairement les frais de la réforme. Le compte se traduit par la suppression annoncée de 23 des 181 TGI du pays et 176 des 473 TI, juridictions de proximité s’occupant des tutelles, des expulsions ou du surendettement. La chancellerie a également prévu la suppression de 55 tribunaux de commerce et la fermeture de 67 tribunaux de prud’hommes. Des décrets devraient être publiés avant mars 2008 officialisant leur suppression et la réforme s’étalera sur trois ans. Sept nouveaux tribunaux d’instance seront créés.
Comment ?
C’est le point le plus délicat. Difficile de voir une cohérence à la nouvelle carte dans son ensemble. De fait, « on fait du cas par cas » assure la chancellerie. Pour faire taire l’ire des uns et l’opposition des autres, la réforme de la chancellerie, pressée par le temps, s’est faite en marchant : la ministre a annoncé dernièrement son intention de remplacer chaque TGI supprimé par un TI « renforcé » : à chaque TGI supprimé, le contentieux familial continuera à être jugé sur place. Les juges de tutelle se déplaceront « au domicile » des justiciables. Il n’existe cependant pas encore de prévisions budgétaires sur le coût de la réforme et aucune étude d’impact n’est disponible. Pour l’instant, après chaque déplacement de Rachida Dati, les services du ministère retournent sur le terrain pour voir concrètement quels sont les besoins.
Quid des professions judiciaires ?
La chancellerie insiste désormais sur les négociations qu’elle mène avec les professions touchées pour leur garantir des mesures compensatoires : accompagnement social pour les fonctionnaires, mesures fiscales pour les avocats. La suppression des TGI entraînera la disparition des barreaux correspondants. Les bâtonniers des 46 barreaux concernés seront reçus le 23 novembre par Rachida Dati. L’idée d’un « vice-bâtonnat » est évoqué par la chancellerie. « On ne sait pas d’où sort cette idée, c’est ridicule », tempête un avocat. Par ailleurs, un accord semblait se profiler avec la chancellerie fin octobre sur des compensations financières pour les avocats touchés par les suppressions de TGI (23 au total) mais, selon le CNB, Rachida Dati n’a pas encore « respecté ses engagements écrits ».




