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Un compte rendu du procès de Charles HOAREAU hier à Marseille

Publie le mardi 30 juin 2009 par Open-Publishing
6 commentaires

de Danièle Jeammet

Un auditeur de l’audience du tribunal correctionnel de Marseille où comparaissait Charles le 29 juin (m’)a adressé le courrier suivant que nous reproduisons de manière anonyme, comme il le souhaite. A cette audience peu banale, un millier de manifestants qui s’étaient donnés rendez vous sur le Vieux Port avaient accompagné le prévenu jusqu’aux portes du tribunal.

"Dans le cadre de mes activités je devais me rendre le 29 juin à l’audience de la 7ème chambre du tribunal correctionnel. A l’arrivée je trouvais un dispositif inhabituel : barrières, policiers en nombre…A mes questions on me répondit qu’était convoqué ce même jour un syndicaliste, Charles Hoareau, qui était accusé de violences et qu’il y avait des manifestants. J’avais entendu parler de cette affaire sans savoir de quoi il retournait et j’avais une sorte de curiosité amusée en gravissant les marches. Comme me l’avais dit un policier à l’entrée : « ça change un peu, ça met de l’animation ! ». Un peu intrigué je montais au 1er étage.

J’attendais encore devant la porte quand Hoareau, que je connaissais pour avoir vu sa photo dans les journaux, est arrivé. Les portes se sont ouvertes et nous sommes rentrés. L’affaire Hoareau fut appelée en premier et je pus entendre l’acte d’accusation qui me donna d’abord envie de rire : « avoir le 7 avril 2009 menacé quelqu’un en pointant le doigt vers lui et en lui disant : « Je t’aurai, je t’aurai ». On peut donc passer en correctionnelle pour ça !

A cette accusation sont ajoutées deux autres qui normalement ne mènent pas en correctionnelle mais peuvent donner lieu à des amendes : avoir pris quelqu’un par le cou et lui avoir donné un coup de poing qui ne l’a que frôlé( ?) ce qui a provoqué un choc psychologique( ?) ayant entraîné un arrêt de travail de 4 jours( ?), avoir craché sur un autre. J’avoue que j’étais de plus en plus intrigué et amusé et que j’attendais avec impatience les explications de cette affaire.

La présidente du tribunal décortique le dossier qu’elle a visiblement bien épluché avant, lit, tire des conclusions ne donnant que rarement la parole à l’accusé qui nie les faits pour le couper aussitôt et mettre en doute toutes ses explications.

Au début de l’énoncé des faits je pensais que Charles Hoareau, pris d’un accès de colère avait pris à partie quelqu’un alors qu’il était seul avec lui, mais au fur et à mesure de l’audience je comprenais que les faits incriminés s’étaient passés dans un tribunal où 30 salariés qui n’étaient plus payés depuis 18 mois, avaient protesté contre le report d’une audience qui étaient la…19ème de leur affaire ! La première question qui me vint : pourquoi dans ces conditions s’il y avait eu bousculade était-il le seul accusé ? On le considérait comme le seul fauteur des troubles ?

A charge et... à charge

Puis à un moment donné, alors que la présidente le harcelait de questions et l’interrompait sans cesse, Charles Hoareau eut cette phrase qui me fit sursauter : « Mais enfin ça c’est passé au tribunal, à 5h de l’après midi, il y avait plein de gens présents, comment ça se fait qu’ils [les plaignants] n’ont aucun témoin ? J’ai demandé à avoir la vidéo mais ce n’était pas possible ! Le rapport de police ne confirme pas les dires de mes accusateurs. »

Et c’est là que je me suis d’un coup rendu compte que Charles Hoareau était accusé sans preuve, par des gens qui n’avaient pas de témoin, à part une employée d’un des deux directeurs…et qui n’était même pas venue à la confrontation demandée par l’accusé !

A l’inverse Charles Hoareau avait plusieurs témoins dont un avocat qui confirmaient ses dires.

Malgré cela le harcèlement continuait à tel point qu’à un moment donné l’avocat de Hoareau lui dit : « Arrêtez-vous ! Ne répondez plus ! On n’est pas dans un débat accusation contre défense ! » mettant ainsi en cause la magistrate qui accusait sans cesse avec un part pris étonnant.

Le tribunal détaillant tout devant un accusé qui ne se démontait pas ni ne s’énervait, il y eut l’épisode du coup de poing qui aurait raté sa cible.

Dans ma tête je me disais : « Mais comment c’est possible ? Hoareau tenait d’une main Le Mons par le cou et de l’autre il n’a pas pu l’atteindre avec son poing ? Il n’a pas l’air d’avoir un bras plus court que l’autre ! ». Franchement cette accusation aurait mérité une reconstitution !! D’autant que Le Mons a déclaré ne pas avoir esquivé le coup mais que celui-ci l’avait effleuré…

Puis il y eut l’épisode risible où l’un des deux accusateurs voulut mimer la scène où Charles lui aurait craché dessus afin d’expliquer pourquoi un avocat présent à 1 mètre de lui n’aurait rien vu ! Comme l’a dit cet avocat « s’il y avait eu quelque chose je l’aurais vu ou alors j’ai besoin de lunettes ! » Et les policiers présents à ce moment là aussi…

Je n’en revenais pas de la haine envers cet homme

Enfin il y eut les plaidoiries.

Maitre Dossetto, l’avocat des plaignants qui est aussi l’avocat des régies et – détail important – était donc présent le 7 avril, jouant sur le mot camarade ne cessa de fustiger Charles qui « se prenait pour un pacha », se permettait d’avoir un comité de soutien et se croyait au dessus des lois grâce à « ses troupes ».

A l’entendre je me disais que la présidente qui avait demandé « Mais pourquoi selon vous ils s’en prendraient à vous ? », avait sa réponse. Je n’en revenais pas de la haine envers cet homme accusé d’être un meneur.

Le procureur lui, essaya de démontrer que les témoins de Charles ne valaient rien en expliquant même pour deux d’entre eux qu’il fallait les rejeter parce qu’il y avait une erreur d’horaire sur le PV d’audition de la police !!!

Plus grave il demanda à ce que le fameux « Je t’aurai, je t’aurai » soit requalifié en menaces de mort !! Dans la salle les gens se regardaient en se demandant s’ils avaient bien entendu…

Sur les 3 faits reprochés il requit la relaxe pour le crachat au nom d’un aspect juridique que je n’ai pas compris (de toutes façons vu les explications vaseuses sur cette question je ne vois pas comment ça pouvait tenir), 1000€ d’amende pour le coup de poing fantôme et 4 mois avec sursis pour les « menaces ».

Vint enfin la plaidoirie de la défense pour cette affaire qui a duré 2 heures.

Parmi les arguments avancés :

 Il y eut celui sur les certificats médicaux de Le Mons : le 7 il va voir son docteur, le 8 il va voir le médecin de l’UML [1] qui ne voit aucune trace de coup…et le soir il retourne chez son docteur qui écrit que la veille il a bien vu des traces sur le cou !

 A l’adresse de l’avocat adverse « A qui vous allez faire croire que Hoareau défend des privilégiés ? Si des gens qui n’ont droit à rien depuis 18 mois ne sont pas des sans droits que vous faut il ? Oui Charles Hoareau a le privilège d’être convoqué pour des propos qu’on entend tous les jours dans les tribunaux et qui d’habitude ne donnent pas lieu à poursuites !

 Ce que je ne comprends pas c’est pourquoi Me Dossetto qui était présent ce jour là a refusé de témoigner ; En pareil cas, si mon client avait été agressé, j’aurais témoigné pour que justice lui soit rendue !

 Oui Charles Hoareau c’est un meneur et s’il n’était pas là ces femmes de ménage ne se seraient pas révoltées ni aussi bien défendues depuis 18 mois et c’est cela qu’on veut lui faire payer ! »

 Et puis il y eut ce passage étonnant : « On a regardé le passé judiciaire de Hoareau sur des faits qui aujourd’hui sont non avenus mais dont on a parlé quand même [2], mais on n’a pas regardé le casier judiciaire de M. Le Mons. On n’avait pas à le faire et je n’ai pas le droit de vérifier mais on m’a parlé de plaintes de salariés pour violences, menaces… » De là où j’étais j’ai vu M. Le Mons se tasser sur la chaise accusant visiblement le coup. Tiens, tiens…

Verdict le 7 septembre.

La salle se vide à moitié. L’audience se poursuit. Un peu plus tard au bar du palais avec quelques clients on reparle de cet après midi particulière. Je ne peux m’empêcher de dire, en témoin privilégié des faits, que je n’avais jamais assisté à un tel procès à charge sur des accusations sans preuves.

Quelqu’un me répond :« Tout à l’heure quand Hoareau est sorti il y avait plein de monde. Il a dit au micro dans aucun pays du monde on n’a pu enfermer un esprit libre. ».

Que dire de plus ?

Un témoin anonyme des faits et jusque là citoyen tranquille.

Post Scriptum :

Les titres sont de Rouge Midi, les photos de Nanou

[1] Unité de Médecine Légiste qui fait foi devant les tribunaux NDR

[2] En 1998 Charles qui avait tenté de s’opposer à l’expulsion d’un sans papier, avait été accusé, alors qu’il était seul, d’avoir blessé deux policiers lors d’une charge de CRS !!! NDR

http://www.rougemidi.org/spip.php?article3914

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ON CONTINUE ON LACHERA PAS
VERDICT LE 7 SEPTEMBRE

Messages

  • « Parole contre parole » au procès Hoareau

    Le cortège était dense, hier, pour accompagner Charles Hoareau au tribunal de grande instance. Le syndicaliste CGT comparaissait pour menaces réitérées, violences envers un responsable de régie en charge du nettoyage des foyers Adoma, et pour avoir craché sur un autre responsable.

    Le 7 avril dernier, les parties sont dans la salle des pas perdus du tribunal. Alors qu’un report d’audience est décidé dans le procès concernant le sort de 39 salariés du nettoyage se retrouvant sans emploi, soutenus par Charles Hoareau, le ton monte. A la barre, hier, le premier responsable de régie est formel. « Charles Hoareau m’a dit en me montrant du doigt : "Je t’aurai" à plusieurs reprises. Il m’a tenu le cou et porté un coup de poing au visage. »

    Après examen par le médecin légiste, il bénéficie de quatre jours d’ITT pour « traumatisme psychologique », mais aucune trace de coup n’est relevé. « J’ai esquivé, précise le plaignant. Il m’a éraflé. » Un témoignage d’une de ses employés confirme sa version. « C’est vrai qu’il y a eu bousculade, mais je n’y étais pas. J’essayais au contraire de calmer les salariés », rétorque Charles Hoareau, dont la version est, elle, appuyée par cinq témoins. « Dans ce dossier, il n’y a pas de place pour l’action syndicale. C’est un acte de délinquance, un point c’est tout », a défendu Michel Dossetto, l’avocat des responsables de régie qui se sont constitué partie civile. Il réclame 1 euros symbolique pour chacun. Si le procureur a demandé la relaxe pour le crachat pour des questions de procédure, il a requis 1 000 euros d’amende pour les violences... et la requalification des menaces réitérées en menaces de mort. Du coup, il a requis quatre mois de prison avec sursis (lire encadré). De quoi faire bondir Philippe Vouland, l’avocat de Charles Hoareau, qui a plaidé la relaxe. « Nous sommes parole contre parole. Il a un témoin, j’en ai au moins trois. A qui bénéficie le doute ? » Pour lui, ce procès révèle surtout la « judiciarisation permanente de la société. Si Charles Hoareau est relaxé, ce ne sera pas le triomphe de la CGT, mais une manière de dire que le juge pénal n’est pas la voiture-balai de tout. » La décision est attendue le 7 septembre. W

    S. H.

    http://www.20minutes.fr/article/335914/Marseille-Parole-contre-parole-au-proces-Hoareau.php

  • Si on regarde les choses de façon objective on ne peut que constater que la justice n’est plus, elle, objective. Même si on est beaucoup à être sensibilisés par des affaires comme celle de Hoareau, même si on a tendance à vouloir préviligier la veuve et l’orphelin, il y à trop d’affaires où l’on sent la main du pouvoir sur la justice pour ne pas faire le constat qu’elle est manipulée.

    Je sais que comparaison n’est pas raison, mais souvenons-nous de l’affaire Colona, dès que la justice est confrontée à la politique le dictat du pouvoir est omniprésent, c’est l’apanage de toutes les dictatures...

  • Absolument pas surprise par la manière dont se sont déroulés les "évènements" à ce procès - c’est le contraire qui m’eut étonnée.

    Hoareau est un emblème, Hoareau les emmerde depuis tellement d’années dans les bouches du Rhône et au delà, c’est sûr qu’ils veulent sa tête et sont prêts à tout.

    Il est nécessaire de construire un vrai front de classe autour de Charles et des salariés d’Adoma, et au delà de résister pied par pied à toutes les attaques du patronat, et non seulement de résister mais de leur mettre sur la t... un bon coup.

    Solidarité avec le camarade Charles Hoareau, avec les salariés d’Adoma et avec tous les militants et citoyens poursuivis pour leurs luttes ou leurs expressions.

    Exigeons de nos fédérations qu’elles se positionnent en faveur de Charles et de ces salariés.

    LL

  • Charles,t"en fait pas on les aura.Quand a la conf ,ou est-elle ????????? Vive la lutte !momo11