Tout d’abord, contrairement à ce qu’écrit M. Ariès, je n’ai jamais « sollicité sans succès un poste de député en 2017 » auprès de Jean-Luc Mélenchon. Je n’ai rien sollicité, et rien ne m’a donc été refusé. Ariès ment.
Et lorsqu’il n’invente pas, il déforme, jusqu’à me faire dire le contraire de ce que j’ai écrit. Il voudrait ainsi faire de moi un chantre du transhumanisme. Pour cela il s’appuie sur mon livre « Vivant » et cite la page 249 où j’évoque les Gafam auxquels il prétend que je « rends hommage » alors même que deux pages plus loin, je dénonce « les transhumanistes de la Silicon Valley, tous imprégnés du dogme libéral et du souci de l’élite ». Et à cette page 249 que cite M. Ariès, j’écris en réalité ceci : « Nous avons des raisons de nous inquiéter. Souvenez-vous de la mise en garde de Stephen Hawking selon qui « le développement d’une intelligence artificielle complète pourrait signer la fin de l’humanité ». Dans un chapitre où je m’interroge sur nos rapports futurs avec l’informatique, Ariès confond savamment constats et souhaits, alertes et incantations. Il prétend ainsi que « l’alpha et l’omega de mon programme » serait « l’homme augmenté ». En réalité, dans ce chapitre équilibré, après avoir observé que l’homme augmenté est un processus en cours (prothèses, membres artificiels…), j’explique qu’il nous faut « imaginer un cadre législatif pour gérer nos relations avec les intelligences artificielles et peut-être même les limiter afin qu’elles ne prennent pas le pouvoir sur nous et qu’elles ne nous privent pas de notre humanité » (« Vivant », p.253). Dans un autre ouvrage, « La revanche de la nature », je loue les écrits du penseur écologiste Lewis Mumford et j’écris : « La grande idée de ce dernier est le remplacement de la puissance par la plénitude : il nous faut « renoncer aux prétentions paranoïdes et aux absurdes espoirs du complexe de puissance, et accepter la finitude, la limitation, l’incomplétude, l’incertitude et la mort finale comme des attributs de la vie (…) ». Avec Lewis Mumford, nous sommes loin des transhumanistes. » (Page 68). Par ailleurs, plusieurs de mes livres renferment le même message, qui est « l’omega de mon programme » : « protéger le vivant sous toutes ses formes » (« La revanche de la nature », p.245 ). Protéger le vivant, pas protéger la machine.
Un peu plus loin dans son texte, M. Ariès m’accuse encore de « toute-puissance infantile » en me prêtant l’intention de « prendre le contrôle de la nature comme d’un enfant », mettant cette phrase entre guillemets pour me l’attribuer. Mais il ne propose aucune référence pour justifier cette citation. Et pour cause. En réalité, j’ai précisément écrit ceci, dans « Antispéciste », page 364 : « L’éthique nous sort de la nature. Or l’écologie essentielle est une éthique. Donc l’écologie essentielle nous sort de la nature. Mais si nous sortons de la nature, c’est pour mieux en prendre soin, comme un adulte quitte l’enfance pour s’occuper de ses propres enfants. » Puis je développe : nous devons devenir « tuteurs » de la nature, et cesser d’en être exploiteurs. Il ne s’agit donc nullement de « prendre le contrôle » mais de « prendre soin ». La nuance est de taille.
M. Ariès m’attribue par ailleurs une « foi béate dans les technosciences ». Dans « La revanche de la nature », j’explique au contraire : « Une conséquente effrayante découlera de cette hypertechnologisation de notre quotidien : la mise à distance de tout autrui de chair et de sang, remplacé dans nos interactions par des avatars numériques et des robots en ligne. » Je m’appuie alors sur le philosophe autrichien Günther Anders et sur sa théorie du « décalage prométhéen » pour alerter sur « le débordement de l’homme par la technique surpuissante ».
A propos de ma vision de la démocratie, Paul Ariès fait mine de s’interroger : « Quel rapport entre les thèses du père de la VIe République et la pensée politique d’Aymeric Caron ? ». Il serait encore bien trop long d’apporter ici une réponse complète à cette interrogation. Mais je livre déjà une piste, que l’on trouve dans « Antispéciste », lorsque j’appelle à « une assemblée constituante qui fonde une nouvelle République ». Exactement comme Jean-Luc Mélenchon. Je ne m’étendrai pas ici sur les manipulations que tente M. Ariès autour de ma proposition d’« Assemblée Naturelle », qui n’est qu’une version propre d’une idée portée aujourd’hui par plusieurs penseurs écologistes. M. Ariès veut laisser croire que le peuple serait exclu de mon projet politique, alors que c’est tout l’inverse : je promeus « la possibilité pour chaque humain d’exprimer son opinion et de peser sur les décisions politiques. Il s’agit de redonner le pouvoir à l’individu ». Je promeus encore « la possibilité pour chaque humain d’exprimer au mieux son être en s’épanouissant dans la réalisation de lui-même. » (« Antispéciste », pp. 423-424)
L’entreprise de diffamation de Paul Ariès peut interroger. Elle trouve son explication dans la détestation des véganes et des antispécistes qu’exprime régulièrement M. Ariès. Cela nous avait d’ailleurs valu un échange dans un hebdomadaire, en 2019, au cours duquel j’avais proposé à M. Ariès cette expérience de pensée, alors qu’il me reprochait ma trop grande sollicitude pour mes animaux dits « de compagnie » : et lui-même, s’il devait choisir entre sauver la vie de son propre chat ou celle du pédocriminel Marc Dutroux, laquelle choisirait-il ? « Dutroux, sans hésiter », avait-il répondu, plaçant ainsi l’individu humain, quels que soient son absence de morale et ses crimes, au-dessus de tout animal non humain, même le plus affectueux, le plus innocent et le plus fidèle, révélant ainsi son anthropocentrisme exacerbé, aveugle, et pour tout dire anachronique.
Aymeric CARON