Police-Armée : que Dale pour Noël

23 décembre 2022 la forêt de Yablokov

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Police-Armée : que Dale pour Noël
Les culs-gâtés ont des cadeaux toute l’année
Que Dale pour Noël
Du joujou en métal plein le panier à salade

Rappel : https://bellaciao.org/fr/Le-syndrome-du-Joint-Francais-Appel-a-crosse-en-l-air-generale

Des articles :

A/
https://floraisons.blog/armee-et-ecole/
06 Avr 2022

Armée et école

En 2019 Greta Thunberg s’adresse aux puissants de ce monde : « Je ne devrais pas être ici. Je devrais retourner à l’école de l’autre côté de l’océan ». Mais est-ce que Greta devrait retourner à l’école ? Et si l’école faisait partie du système écocidaire ?
Extraits choisis de La fin de la mégamachine de Fabian Scheidler :
« La mégamachine formée au début des Temps modernes a eu besoin, pour nourrir sa croissance effrénée, d’intégrer dans ses structures de plus en plus d’être humains. Ou plus précisément, elle avait besoin de corps, de corps qui fonctionnent, que ce soit dans l’armée, les mines ou les manufactures, de corps qui ne suivent pas leurs propres impulsions et leurs propres rythmes, mais des cadences mécaniques. Ces corps, il a d’abord fallu les fabriquer. Et pour ce faire, il était nécessaire de briser le continuum de l’âme, de l’esprit et de la chair dans lequel les êtres humains vivent naturellement.
L’un des plus importants instruments employés à cette fin à été l’armée. À côté de l’esclavage, l’armée est le système le plus abouti qui ait jamais été imaginé pour mettre l’homme sous tutelle. Elle représente une tentative radicale pour organiser les relations humaines sur le modèle de la machine, d’après le principe de l’articulation mécanique de la cause et de l’effet, c’est-à-dire du commandement et de l’obéissance. L’armée idéale n’a rien d’un organisme vivant, imprévisible et spontané. Avant même d’avoir physiquement tué la moindre personne, l’armée organise les humains sur le modèle de la mort. […]
Pour mettre les corps au pas, un élément essentiel a été l’introduction massive de sanctions pour châtier toute infraction. […] Toutefois, la discipline militaire ne s’est pas contentée de ce genre de rituels avilissants et asservissants. Ce qui lui importait, c’était d’investir et de rendre utiles tous les mouvements du soldat, de s’emparer de ses moindres gestes, de chacun de ses regards pour les intégrer au rythme d’ensemble, autrement dit : d’élaborer une “microphysique du pouvoir” (Michel Foucault) qui permette de pénétrer la chair au plus profond. […] Pour faire de son corps un automate docile dans les mains d’autrui, le subordonné doit lui-même participer activement à la maîtrise et à l’oppression de son propre corps. Il doit devancer le commandant qui risquait de le blâmer pour une main qui n’est pas au bon endroit ou une expression du visage qui n’est pas conforme au règlement. Il doit se transformer en commandant de lui-même. […]
Un système qui ne repose que sur le châtiment tend à favoriser toutes sortes de résistances, d’obstructions, de sabotages et de désertions secrètes, voire pousse à la révolte ouverte. De plus, il coûte cher puisque le contrôle des subordonnés exige énormément de surveillance. C’est pourquoi les experts militaires se sont rapidement rendu compte, à l’instar de leurs collègues pédagogues, qu’il est bien plus efficace de transformer le système unidimensionnel de sanction en un système bidimensionnel de notation prévoyant de récompenser les comportements que l’on souhaite voir advenir et de sanctionner les autres. […] Les évalués deviennent les surveillants d’eux-mêmes.
Le stade ultime de ce développement est atteint quand les gens ont tellement intériorisé ce système qu’ils croient suivre leur propre volonté quand ils ne font de fait que remplir les exigences du système. Le mode d’organisation de l’armée a servi au cours des siècles de modèle à un grand nombre d’institutions : la prison, la maison de correction, l’usine, le sport ainsi que l’école. Mais le système scolaire moderne ne s’est pas seulement inspiré de l’armée : il plonge aussi ses racines dans les écoles monastiques […]
L’école moderne est née de la rencontre entre l’ascèse chrétienne et le dressage militaire. Comme le monastère et l’armée, l’école repose d’abord sur l’enfermement : un groupe déterminé de personnes est mis à part, à l’écart du monde extérieur dans un établissement fermé qu’elles ne doivent pas quitter sans en avoir obtenu la permission. Au sein même de l’école, l’espace est soumis à une parcellisation minutieuse : chaque élève a sa place dont il ne doit pas non plus partir sans autorisation […] les élèves doivent être assis de telle sorte que le professeur puisse tous les embrasser du regard. […] Chaque parole devient un ordre censé entraîner une obéissance immédiate. Comme dans l’armée, tous les muscles sont concernés, la mise au pas des mouvements doit être totale, aucun écart ne peut être toléré […]
Le but d’un tel dressage était de créer une machine à apprendre fonctionnant sans frictions […] Dans la salle de classe, un élève n’a […] ni le droit de prendre la parole, ni celui de se déplacer de sa propre initiative, mais seulement sur ordre d’une autorité. Il ne lui est même pas permis d’aller de lui-même prendre l’air à la fenêtre. Il ne doit pas communiquer avec son voisin de table […]. Même les prisonniers en maison de réclusion ont plus de droits que les écoliers en salle de classe.
De prime abord, la persistance de ce système a de quoi surprendre […] Mais dès qu’on y regarde de plus près, on comprend que si l’institution scolaire refuse tellement d’évoluer et d’apprendre, c’est pour une raison très simple. Dès le début, la raison d’être de l’école n’était pas tant d’enseigner des matières que d’atteindre un objectif pédagogique plus général : inculquer un mode d’être qui est indispensable pour pouvoir ensuite s’intégrer au mécanisme de l’économie – l’aliénation.
L’école prépare les élèves à accomplir des tâches interchangeables pour gagner des points dans un système abstrait de sanctions et de récompenses, au lieu de faire ce qui les intéresse et de développer des capacités susceptibles de satisfaire les besoins humains. Avoir assimilé une telle aliénation est la condition pour que les gens soient plus tard prêts à trouver leur place dans une économie aliénée. […] L’économie moderne a besoin d’être humains aliénés. À la place des centres d’intérêt personnels et de l’expérience du sens, elle met le salaire, une somme d’argent de valeur abstraite qui est censée dédommage d’un travail souvent ressenti comme absurde ou démoralisant – exactement comme à l’école où la notation se substitue à la satisfaction d’apprendre. »

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B/

https://www.terrestres.org/2019/03/05/la-fin-de-la-megamachine-histoire-dune-civilisation-au-bord-du-gouffre/
5 3 2019
La Fin de la mégamachine. Histoire d’une civilisation au bord du gouffre
Fabian Scheidler, journaliste et dramaturge allemand, a publié en 2015 La fin de la mégamachine, un ouvrage important qui retrace l’histoire et les apories de la civilisation industrielle et sa logique d’accumulation sans fin. Terrestres propose ici pour la première fois des extraits en français.
Extraits de Fabian Scheidler, Das Ende der Megamaschine. Geschichte einer scheiternden Zivilisation, ProMedia Verlag, Vienne, 2015.
Extraits choisis, traduits et présentés par Aurélien Berlan.
*
Depuis l’extinction des dinosaures il y a 65 millions d’années, jamais la vie sur terre n’avait connu une crise aussi grave que celle provoquée par la civilisation industrielle. Dès lors, comment comprendre que cette civilisation, qui se présente volontiers comme l’incarnation de la raison et du progrès, soit incapable d’abandonner une voie aussi manifestement suicidaire ? Dans Das Ende der Megamaschine. Geschichte einer scheiternden Zivilisation, Fabian Scheidler part de l’hypothèse que, pour trouver des éléments de réponse, il faut revenir à la question du pouvoir, à ses diverses formes et à leur fusion historique au sein de cette « mégamachine » – selon la formule de l’historien État-unien Lewis Mumford – que constitue le capitalisme moderne. Par le biais d’une vaste enquête qui parcourt les cinq derniers millénaires, le livre identifie les racines du pouvoir économique, militaire et idéologique. La première partie analyse l’apparition des premiers systèmes de domination dans l’histoire, en lien avec la montée en puissance du « complexe métallurgique », fondement de la production d’armes, du système monétaire et des visions technocratiques du monde. La seconde est consacrée à l’apparition et à l’expansion du système-monde capitaliste au cours des cinq derniers siècles. Ce faisant, Scheidler démonte le mythe occidental du progrès et montre comment la logique de l’accumulation monétaire sans fin a, dès ses débuts, dévasté les sociétés humaines et les écosystèmes naturels. Depuis sa publication en 2015, La fin de la mégamachine est devenu dans l’espace germanophone l’un des livres les plus discutés sur la crise que nous traversons. Pour en savoir plus, voir la partie (en anglais) du site www.megamaschine.org/en.
(suite sur lien).

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C/

https://www.revue-ballast.fr/paul-rocher-une-police-democratique-est-une-contradiction/

Paul Rocher : « Une police démocratique est une contradiction »
10 décembre 2022

« Que faire de la police ? » nous demandions-nous il y a deux ans dans le dixième de nos numéros papiers. Les appels à son abolition se multipliaient alors, en France comme aux États-Unis. Le mouvement Black Lives Matter, fondé en réaction aux meurtres d’Afro-Américains, les violences policières ordinaires et la répression du mouvement des gilets jaunes amenaient, plus largement qu’auparavant, à questionner l’existence même de l’institution policière. Le député France insoumise Ugo Bernalicis et la philosophe Elsa Dorlin, autrice de Se défendre, répondaient à nos questions : abolir, réformer, refonder : quelles perspectives concrètes ? « Que fait la police ? », se demande aujourd’hui l’économiste Paul Rocher dans un livre du même nom paru aux éditions La Fabrique — après avoir proposé, avec l’essai Gazer, mutiler, soumettre, une analyse de l’armement policier « non létal ». Et l’auteur d’avancer qu’il est tout à fait possible de « s’en passer ». Nous l’avons rencontré pour en discuter.

Commençons par une phrase récente de l’ancien préfet de Police de Paris, Didier Lallement : « Il n’y a pas eu de morts à Paris pendant la crise [des gilets jaunes]. On a frôlé l’ouverture du feu mais, grâce au courage des fonctionnaires de police, cela ne s’est pas produit. […] Le jour où on devra ouvrir le feu, on entrera dans une autre dimension. Cela risque d’arriver un jour. »

Didier Lallement souligne le courage des policiers. Revenons aux évolutions de leur action et du maintien de l’ordre. Si on prend un policier en 1968 et un autre aujourd’hui, il y a évidemment des écarts énormes. Ils sont de plus en plus équipés en matériel de protection. Mais ils sont alourdis, aussi, ce qui rend d’autant plus important l’acquisition d’armes qui peuvent parcourir de grandes distances. Une arme comme le LBD 40, par exemple, compense la perte de mobilité du policier. La police gagne donc sur les deux tableaux : elle peut intervenir très facilement et est beaucoup plus protégée. Pour les manifestants, ça a des implications importantes. Si la police veut maintenir l’avantage stratégique que lui procure le LBD, elle doit assurer une distance constante avec les manifestants. Ça implique, aussi, de ne plus tirer à partir d’un constat manifeste d’hostilité, mais à partir de présupposés sur ce qu’un manifestant pourrait avoir, potentiellement, comme intention.

Ensuite, croire que la police réussit une intervention quand elle ne fait pas de morts est une évaluation extrêmement biaisée qui occulte un phénomène majeur : les blessés et les mutilés. Les données du ministère de l’Intérieur, à ce titre, sont inopérantes et inutiles. Le discours initial selon lequel il n’y a pas eu de violences policières à l’encontre des gilets jaunes a été ajusté ensuite avec un chiffre d’environ 2 500 blessés, sans aucune explication. À côté de ça, on a une source autrement plus fiable, celle des street medics, qui donne une estimation statistique arrivant à 25 000 blessés durant tout le mouvement (incluant la période de la contestation de la réforme des retraites en 2019 et 2020), dont 3 000 graves. Si on prend en compte les conséquences des gaz lacrymogènes, on monte même à plus de 300 000 personnes touchées. Et là, on ne compte que les blessures physiques. C’est considérable et extrêmement préoccupant : la police occasionne des blessures durables. Mettre l’accent sur les morts, c’est occulter l’explosion des violences policières. S’en tenir uniquement au maintien de l’ordre en manifestation est biaisé, enfin, parce qu’il y a des morts associés aux interventions policières qui ont lieu dans d’autres cadres que celui-ci, mais qui restent sous la responsabilité du préfet.

« Mettre l’accent sur les morts, c’est occulter l’explosion des violences policières. »

Enfin, s’il y a eu autant de blessés à cause de la police, c’est que le nombre de tirs a énormément augmenté. On a assisté durant la décennie 2010 à la généralisation des armes non létales et à l’explosion de leur usage — plus de 30 000 tirs en 2018. Depuis, on est resté sur un plateau extrêmement élevé, autour de 10 000 tirs par an. Ça illustre l’un des effets de l’arme non létale : plutôt que de conduire à un maintien de l’ordre plus éthique, plus humain, elle participe à sa brutalisation. En insistant sur la non-létalité, on incite les policiers à utiliser leurs armes — sans que l’utilisation des armes à feu diminue : au contraire. Il n’y pas de substitution des outils. Ce qui est remplacé par les armes non létales, c’est la gestion des conflits par des méthodes non violentes. Donc : peut-on appeler ça du « courage » ? En réalité, il y a feu à volonté sur des milliers de manifestants qui ne le méritent aucunement.

S’il y a mutilation ou décès du fait d’une arme non létale, ça ne peut, par définition, qu’être considéré que comme un accident par ceux qui en font l’usage.

Le recours massif aux armes non létales apparaît dans les années 1990. Il y a un effet d’annonce : voilà une arme qui ne cause pas de blessure définitive, mortelle ou handicapante. Commence alors une véritable fuite en avant technologique. Aujourd’hui, la dénomination a changé : le ministère de l’Intérieur parle d’armes sublétales, à létalité réduite… Mais ce sont les mêmes objets. Un glissement sémantique a été rendu nécessaire parce qu’il n’était pas crédible de parler d’armes non létales quand ces mêmes armes tuaient ou mutilaient largement. Il y a des témoignages, mais il y a aussi une série d’études scientifiques, médicales, qui l’attestent pour les différents types d’armes qu’on a en France. La non-létalité semble offrir une promesse d’efficacité sans violence. C’est la raison pour laquelle on trouve ces armes en grand nombre pendant la période néolibérale, où le consentement des masses à l’ordre établi tend à diminuer, ce qui implique un rôle plus important de la coercition. En même temps, l’État ne peut pas se permettre d’apparaître comme ouvertement violent. C’est pour ça qu’il est si rétif à parler de violences policières. « Ne parlez pas de répression ou de violences policières, ces mots sont inacceptables dans un État de droit », déclarait Emmanuel Macron en 2019.
(suite sur lien)

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D/
https://desarmons.net/2020/11/30/31665/
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